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Fais chauffer tes guiboles, on part en rando !

  • Photo du rédacteur: Théoph Lemaitre
    Théoph Lemaitre
  • 7 mars 2016
  • 9 min de lecture

Je crois bien que l'un de mes défis majeurs en Nouvelle-Zélande était de marcher. Marcher avec des copains parce que c'est convivial, marcher seul parce que ça fait réfléchir, et surtout marcher ici parce que c'est beau.


C'est donc sur la Kepler Track qu'Antoine et moi nous sommes lancés : un défi de trois jours, une boucle de soixante kilomètres, de la montée intense et de la descente solide ! Emmanuel doit nous rejoindre à la veille d'attaquer la Great walk (c'est comme ça que les plus grosses randonnées de Nouvelle-Zélande sont appelées). François a également décidé de se joindre à l'aventure, ainsi que Cantin, son fidèle sherpa belge !



Les journées s'enchaînent, nous rapprochant inéluctablement du matin fatidique du départ ! Nous nous préparons du mieux que nous pouvons, faisant des listes, étudiant quels types de repas pourront le mieux convenir au poids final de nos sacs... Cuits ? Pas cuits ? Après reflexions, ce sera cuit. On rajoute à nos bagages un gaz cooker, trois bombonnes de gaz et une petite marmite, niveau vêtements ça sera le strict minimum : deux slips, deux paires de chaussettes, et pour le reste de toute façon on ne sera pas sales !

Bon c'est pas mal, on devrait s'en tirer pour 7-8 Kg de bagages chacun.


Le départ se rapproche. Catastrophe, Cantin abandonne ! Après la marche de la Muller Hut, il semblerait qu'il se soit ravisé sur ses capacités à gravir des monts et faire du camping sans un bon matelas et ses deux steaks par repas. Il nous faut donc répartir les poids non plus dans cinq sacs, mais dans quatre ! On passe alors à une bonne dizaine de kilos par personne !



J moins un


Nous voici enfin rendus à Te Anau, ville de départ du Kepler Track. Nous profitons alors d'une dernière bonne pinte et quelques nachos avant le départ.



Emmanuel doit toujours nous rejoindre en stop depuis Oamaru, il semble qu'il ait pris un peu de retard sur ses 5 heures de route jusqu'ici.

Il est 19h et nous nous rendons au camping, pour profiter d'une dernière bonne douche avant de suer à grandes eaux pendant trois jours ! Ça fait du bien, l'excitation monte !


Il est 22h, un dernier coup de stress avant d'aller dormir : Emmanuel est toujours à Gore, à une bonne heure et demie d'ici. Il fait nuit et il est évident que sur une route aussi peu fréquentée que celle-ci personne ne le prendra. Il veut retenter demain à quatre heures du matin, pour un départ ici à dix heures... Non, trop compliqué, trop risqué : on prend la voiture et on fait l'aller-retour ce soir !


Presque une heure du matin, nous voici enfin tous réunis, les sacs sont prêts, il ne nous reste plus qu'à profiter de ce qu'il reste d'une bonne nuit de sommeil.



Jour un

Rainbow Reach park – Iris Burn Campsite (22,2Km)


Sept heures trente, le réveil est difficile, la nuit a été plutôt courte.

Petit déjeuner, on replie la tente, on range les vans, on termine une bonne fois pour toute de remplir et ranger nos sacs.

François rajoute la touche finale : une bouteille de rhum et une bouteille de vin dans ses bagages. Eh oui : sans carburant on ne risque pas d'aller loin !


Direction le parking du trek, départ de la marche. Tout le monde est à cheval sur le temps : l'heure c'est l'heure, si on prend du retard on s'en voudra à l'arrivée et on montera la tente de nuit !

Les voitures sont garées, on prend quelques photos. Dix heure dix. On n'est presque pas en retard, tout va bien ! Un petit bouchon de rhum pour se motiver et on y va !


Ah non : au moment de fermer le coffre du van, un groupe de californiennes débarque, elle viennent de finir le trek et demandent s'il est possible de les ramener dans le centre-ville. A ce moment précis plus personne n'a l'impression que partir à l'heure est important, les gars demandent comment était le trek avec un grand intérêt, quel temps il faisait ces trois derniers jours, d'où elles viennent, comment elles apprécient la Nouvelle-Zélande. Cantin se fait une joie de les ramener à Te Anau, François le regarde avec une pointe d'envie, il se dit qu'il aurait peut-être dû abandonner lui aussi. Quant à Emmanuel, il est intarrissable de questions...



Dix heure cinquante : enfin ! C'est la dernière fois que je regarde l'heure. Les voitures sont fermées, Cantin est parti, les californiennes avec, et nous traversons enfin le pont qui marque le début de notre aventure.

A peine de l'autre côté de la rivière, nous pénetrons dans une magnifique forêt, un petit chemin de terre chaude nous montre la voie, partout ailleurs, la végétation est composée de mousse qui recouvre jusqu'à la plupart des troncs d'arbres encore humides. Le soleil parvient difficilement à se frayer un chemin entre les feuilles, mais lorsqu'il le peut c'est pour nous offrir une lumière digne d'un film d'Hayao Miyazaki.


Ça y est, le décor est planté pour la journée et nous profitons de chacun de nos pas sur ces vingt-deux premiers kilomètres.


Nous marchons assez vite, chacun à son rythme, profitant aussi du spectacle qui nous est donné par le décor, et de la symphonie que la forêt nous laisse entendre : entre l'été provençale que nous chantent les cigales et la mélodie que nous jouent tous ces nouveaux oiseaux néo-zélandais, nous nous laissons embarquer dans nos rêveries et plaisanteries pendant que nos jambes font le reste du boulot et nous amènent, décidées, vers le premier point de pique-nique, puis vers Iris Burn : le premier campsite.


La journée s'achève plus vite que ce à quoi nous nous attendions, c'était plat, mais tout de même intense : vingt-deux kilomètres ça se sent dans les jambes à l'arrivée. On défait cette fois encore les sacs, mais pour monter les tentes : je dors avec François, Antoine avec Emmanuel. On s'étire un peu, puis on mange et on bois un coup autour d'un bon feu : la journée de demain sera intense, on en discute un peu avec les autres marcheurs qui font le trek dans l'autre sens et qui viennent d'arriver au campsite aussi. Ils confirment : demain sera difficile. Très beau, mais difficile.


On plaisante une dernière fois, si jamais on n'y arrive pas, qu'on reste bloqués en haut, on n'aura qu'à manger Emmanuel en attendant l'hélicoptère dans un abri. On ne risque rien.

On va se coucher, seule la fatigue nous permet de nous assoupir sur les tapis de sol, de toute façon on sentira nos courbatures demain quoi qu'il arrive, donc matelas ou pas, il n'y a pas de grande différence.





Jour deux

Iris Burn campsite - Brod Bay campsite (23,2Km)


Au petit matin le ciel s'est un peu couvert, les sandflies se battent contre la moustiquaire pour rentrer dans la tente. On se lève, on prend notre petit déjeuner : muesli pour tout le monde : n'oublions pas de rester léger ! L'intérêt à voyager avec sa nourriture sur le dos c'est que l'on s'allège repas après repas, ce qui est plutôt de bonne augure lorsque la journée commence avec un dénivelé positif de mille mètres sur les quatre premiers kilomètres !

François est le plus heureux de tous : les bouteilles sont un peu moins lourdes que la veille.

Ce matin l'étape la plus difficile n'était finalement pas de se lever et faire face à nos courbatures, non de ce côté ça allait. La vraie épreuve de ce matin consiste à replier la tente au milieu des sandflies qui nous harcèlent depuis la veille !


Là, je me dois d'ouvrir une courte parenthèse concernant les fameuses sandflies, ces insupportables bestioles. Les sandflies sont simplement de petits insectes volants, exactement comme les moucherons en France. A l'exception que ces moucherons piquent, et surtout elles grattent : trois jours plus tard les piqûres vous grattent encore jusqu'au sang ! Les sandflies attaquent parfois par centaines : des armées entières qui vous agressent sans relâche ! Impossible de s'en débarrasser. Comme dirait l'autre : t'en écrases un, y'en dix qui renaissent ! Les sandflies sont donc extrêmement énervantes, et comme je tiens à vous et que j'aime donner des conseils, en voici un : pour votre futur voyage au pays des maoris, prévoyez un lance-flamme.


Nous voici donc enfin repartis pour notre plus grosse journée. Ce matin, pas d'échauffement : on attaque la montée dés le début ! Le mieux c'est de ne pas réfléchir et de rentrer dedans ! "Dré dans l'pentu" comme diraient nos amis haut-savoyards.

La montée est longue et éprouvante, quelques pauses sont nécessaires mais il nous faut les limiter pour ne pas s'épuiser trop rapidement et garder de la réserve pour le reste de la journée.

Le décor est le même que la veille, si ce n'est que plus on monte, plus les espaces entre les arbres nous laissent découvrir la vallée que nous avons traversé la veille. Encore un beau spectacle.


Enfin ! Je sors de la forêt. Encore deux ou trois lacets et je serai venu à bout de cette foutu ascension ! Je retrouve Antoine et François. Le décor est magnifique, on peut distinguer des monts, certains sont encore enneigés, le sommet nous cachait aussi la vue du lake Te Anau. C'est beau. Autant d'efforts et une telle beauté méritent bien une petite photo souvenir...


On reprend notre route. Marcher sur les crêtes entre les sommets est une expérience particulièrement jouissive. En plus de jouer tantôt avec le vent, tantôt contre lui, nous nous régalons aussi de pouvoir admirer un décor magnifique des deux côtés de la crête en même temps. La splendeur du paysage, entre vallées, forêts et montagnes est cette fois digne d'une scène du Seigneur des Anneaux !


Les pauses sont de plus en plus longues, manger nous fait du bien ! Ça nous aide à garder de la motivation pour retourner marcher. Nous arrivons presque au moment fatidique de la descente : mille deux-cents mètres de dénivelé qui seront probablement aussi éprouvants que la montée pour nos genoux et chevilles qui commencent à fatiguer de tous ces kilomètres.

Avant cela une escapade vers le Mount Luxmore (1472m) nous offre l'un des plus beaux point de vue que nous ayons pu avoir depuis le début du trek. Un autre détour nous mène à la grotte Luxmore où notre ami Emanuel, faute de lumière choisi avec panache de s'allumer le crâne contre une stalactite. Rien de bien méchant : un pansement et on est repartis ! Les différents paysages se succèdent nous rapprochant petit à petit du Brod Bay campsite.



François commence à délirer : "Raaah ! Marcher ça fait trop penser les gars, marcher ça rend fou !", il esquive une flaque d'eau et continue de parcourir les derniers kilomètres de la journée au pas de course avec moi. Antoine et Emmanuel sont assez loin derrière : leurs chevilles respectives et leurs genoux leur font mal.

"De toute façon quand on aura terminé le trek j'arrêterai de marcher, j'achèterai un fauteuil roulant". Pendant que François continue de fulminer, le lake Te Anau continue de se dessiner derrière les arbres, on y est presque, je le sens.

En effet, vingt minutes plus tard, le chemin nous laisse déboucher sur le camping. Juste au bord du lac, le cadre est idéal. On arrive sur les rives du lac. La lune, ronde surplombe les montagnes sur lesquelles la lumière du soir peint un dégradé de bleu et rose. Nous voici cette fois dans un décor à la Star Wars. Marcher toute la journée pour se retrouver devant un tel spectacle, ça valait le coup !


Une fois tout le monde arrivé, la tente plantée avec vue sur la mer, nous nous mettons à cuisiner, la soirée prend la même tournure que la veille, tout le monde a retrouvé le sourire malgré les courbatures et les crampes cette fois-ci bien présentes. Le vin néo-zélandais était une excellente idée : il est très bon, et en plus de ça il nous remet tous d'aplomb pour la journée de demain. Après tout il ne nous reste que quelques quatorze kilomètres : on va pouvoir dormir un peu plus longtemps que les jours précédents et repartir tranquillement pour terminer la boucle.





Jour trois

Brod Bay campsite– Rainbow Reach carpark (14Km)


Ouch ! Ce matin c'est encore un poil plus compliqué qu'hier soir : les crampes et les courbatures ont refroidi et ça se sent ! Les copains gémissent dans la tente d'à côté, il semblerait que la cheville d'Antoine ne se soit pas arrangée. Malgré nos propres douleurs on se moque un peu d'eux avec François, les coups nous sont rendus. Tout va bien, le moral est toujours là : la journée sera aussi sympathique que la précédente !

Le soleil est déjà assez haut et il tape fort, le temps de prendre le petit déjeuner, de récupérer les affaires mises à sécher de la veille et de plier bagages, nous partons en début d'après-midi pour finir notre challenge.

Malgré la bonne humeur ambiante, les douleurs se font sentir de plus en plus fortes, ma cheville aussi en fait des siennes, ça me ralenti beaucoup.

Après le pique-nique, on repart, tout le monde s'appuit allègrement sur son nouveau bâton de marche. On retrouve peu à peu le décor dans lequel nous avions commencé à marcher deux jours plus tôt.

Les kilomètres, bien que toujours aussi beaux, sont de plus en plus longs, ou peut-être sommes nous de plus en plus lents...


Les copains sont déjà bien loins devant moi, ils sont d'ailleurs peut-être déjà arrivés. En ce qui me concerne je profite de mes derniers pas dans la forêt. Tout est calme, je m'arrête cinq minutes. Il n'y a personne aux environs. Je suis seul face à cette nature. Je ferme les yeux, j'y prends une grande inspiration et je repars pour la dernière ligne droite.


Ça y est : le pont du début de l'aventure se dessine au loin, la boucle est presque bouclée, encore quelques minutes et je serai enfin au bout des soixante kilomètres.

Je pose avec un brun de fierté mon bâton au bout du pont à côté de ceux des copains. Ils m'attendent de l'autre côté, aussi exténués que moi, mais tout aussi fiers.

Ça y est les gars, on l'a fait...



Cantin nous a rejoint, ils prend une dernière photo de nous en tenu rando, c'est marrant mais avec plus ou moins la même pose j'ai l'impression qu'on fait un peu moins les malins qu'il y a quelques jours !

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